FINANCEMENT BASE SUR LA PERFORMANCE
MINISTERE DE LA SANTE PUBLIQUE ET DE LA LUTTE CONTRE LE SIDA
FBP COMMUNAUTAIRE A MAKAMBA : SOUTENIR LES GROUPEMENTS D’AGENTS DE SANTE COMMUNAUTAIRE ET ETENDRE L’EXPERIENCE VERS D’AUTRES PROVINCES SANITAIRES.
Le projet pilote FBP Communautaire à Makamba est à sa quatrième année de mise en œuvre depuis 2011. 27 Groupements d’Agents de Santé Communautaire (GASC) correspondant aux 27 aires de responsabilité des centres de santé à contrat principal sont déjà constitués. Chaque groupement a un statut reconnu au niveau communal. En tout ces groupements comptent plus de 900 membres y compris les accoucheuses traditionnelles.
Les GASC exécutent un paquet d’activités constitués principalement de (i) référence communautaire, (ii) récupération d’abandons, (iii) sensibilisation pour un changement de comportement (visites à domicile et tenue des séances de sensibilisation) et (iv) la prise en charge du paludisme à domicile (PECADOM) amorcée au mois de mars 2014. Faisons remarquer que les ASC rencontrés ont déclaré que parfois leur travail requiert du sacrifice pour les autres !
Madame Niyonzima Judith, de la colline RUREMBA, commune Kayogoro, membre d’un groupement raconte le travail de titan d’un agent de santé communautaire : « Moi, je suis chargée de l’encadrement de 213 ménages. Chaque matin, je me lève à 6 heures. Je consulte mon cahier pour voir le calendrier. Oui, nous avons un calendrier par sous colline à suivre. Alors, je réveille mon mari et ensemble priorisons les activités du jour. Je prends alors mon cahier, et tel un pèlerin, je me rends d’un ménage à l’autre. Je reviens chez moi vers quinze heures de l’après midi. Ah ! Oui c’est un travail fatiguant ; très fatiguant je te dis. Voyez, je me déplace à pied, je n’ai pas de vélo et parfois je suis obligée de prendre une moto malgré mes maigres moyens. Pendant la période pluviale, je dois escalader des montagnes et redescendre sous une pluie battante ! ».
En rapport avec le renforcement des capacités, « nous avons suivi une formation en cascade sur les thèmes variés notamment (i) les techniques de sensibilisation des populations (ii) le diagnostic du paludisme, la tuberculose, l’hygiène et cette formation durait trois jours. La formation suivie a été très utile surtout pour la PECADOM.
Les contraintes observées sont notamment certains chefs de ménages qui ne suivent pas nos conseils. Mais cela ne décourage personne. Nous consacrons trop d’efforts pour ces catégories de gens et à la longue, ils finissent par changer de comportement. Le temps consacré n’est pas proportionnel à la motivation de 500 fbu !!! C’est trop peu !! ». Une autre contrainte non des moindres est celle en rapport avec des contre messages des églises sur le planning familial.
Au centre de santé de Kayogoro, le Président de l’association « Twijukira Amagara meza » fait presque le même récit. Au départ ils étaient à 12 membres seulement. Maintenant ils sont à 25 y compris les accoucheuses traditionnelles. Le paquet de services est le même que celui décrit précédemment.
Le FBP : source des activités génératrices de revenus
Les membres de groupements sont organisés. Ils ont été sensibilisés à pérenniser leurs activités. Selon madame Niyonzima, l’argent du FBP leur a permis d’acheter une propriété de 6 ha, 60 ruches de miel et 10 chèvres pour le groupement en plus d’une chèvre pour chaque membre.
Pour l’association de Kayogoro, ils ont déjà acheté une moto. Et un système de micro crédit est mis en place. L’association a aussi acheté une parcelle de 6,5 ares et l’achat d’un moulin est dans les prévisions. En outre tous les membres ont eu droit à une carte d’assistance médicale ‘CAM » et chaque membre de l’association a une chèvre.
PECADOM : TEMOIGNAGE D’UN ASC QUI A SAUVE LA VIE D’UN ENFANT
Je m’appelle Nitereka Gilbert. J’ai 32 ans. J’habite la colline Muyaga, sous colline Rubaba. C’était le 4/08/2014 à minuit. Exactement ! J’ai entendu du bruit tout près de mon enclos ! Des gens échangeaient, parlaient, discutaient assez fort.. J’ai réveillé mon épouse et sommes restés débout pendant quelques minutes, l’oreille aux aguets, le souffle coupé ! Après quelques temps, à peu près trois minutes, quelqu’un a appelé mon nom. Immédiatement, j’ai reconnu la voix et ai répondu. « Que cherches- tu à cette heure-ci » ? Et l’autre de réponde « ouvres mon ami, je vais te dire les raisons ! Tu vas le voir toi-même » !
Sans tarder, j’ai ouvert la porte. Un couple voisin, avec leur enfant sur le dos, gravement malade. La peur de voir l’enfant mourir avait inhibé tout acte de raisonnement. Le mari et la femme semblaient être tous tétanisés. La femme, elle, pleurait. Elle gémissait et criait fortement. Elle courait dans tous les sens. Se griffonner le visage, se tirait les cheveux ! Bref, elle remuait ciel et terre pour que son enfant ait la vie sauve ! Le couple quant à lui commençait sans doute à prétendre la mort causée par des féticheurs voisins.
Calmement, je me suis dis : il faut faire quelque chose ! Quoi, interroge mon âme ! Par quoi commencer ? Par quoi terminer ? Comment vais-je calmer mes voisins ? Quels mots vais-je utiliser ? Bref, comment le dire ? A quel moment de le dire ? La situation était pathétique tellement je ne voulais pas les voir ni leur parler ! À côté de cela mon fort intérieur me murmurait :« Et si tu échouais, accepteras-tu de vivre cet échec tout le reste de ta vie sur terre » !
Moi aussi j’ai eu la frousse ! Vraiement, j’ai eu peur ! Soudain, mon épouse m’a interpellé et j’ai pris l’enfant dans mes bras. J’ai pris la température, l’enfant avait 39°C. Enorme s’exclame son père qui, lui aussi imite sa femme à gémir ! Les pleurs commencent, le désespoir gagne.
A ce moment, j’ai pris la goutte épaisse, et le test a confirmé effectivement le paludisme. J’ai donc administré les médicaments nécessaires disponibles à ma portée et ils sont repartis visiblement découragés, le cœur meurtri, sans espoir de revoir encore leur enfant vivre. Aucun ! Je les ai rassuré, en vain. Ils s’exclamaient « ni ivy’isi ntakundi » . « C’est le destin, nous n’y pouvons rien ! ». Sans doute ils pensaient ou murmuraient/ mijotaient à la vengeance contre ces présumés féticheurs !
Le lendemain, très tôt, je me suis rendu chez mon voisin. Quelle surprise. Quelle joie ! Oh mon Dieu quelle a été ma grande satisfaction ! : « Le même enfant est venu me saluer en criant « Voilà l’homme grâce à qui j’ai eu la vie sauve, yehh ! ». Quelques jours après la maman et l’enfant sont venus nous rendre visite et ils nous ont dit merci. Cette expression m’a touché droit au cœur. Aujourd’hui tous les enfants du village me connaissent, et à chaque doute ils demandent à leur parent de les emmener chez moi. Je me suis senti soulagé, fortifié et renforcé dans mon métier et surtout dans le village.
Etendre les expériences pilotes FBP communautaire dans les autres provinces sanitaires
Les expériences pilote du FBP communautaire à Makamba semblent être sur une bonne piste. Aujourd’hui, sous l’encadrement de l’IADH, les agents de santé communautaire ont une détermination d’aller de l’avant. Les efforts et les résultats obtenus surtout dans le cadre de la PECADOM dans la province sanitaire de Makamba mériteraient d’être partagés avec les autres provinces en vue d’avancer sur le même rythme en matière de santé communautaire. Cela renforcerait le système de santé au niveau périphérique.
Les activités génératrices de revenus de certains GASC méritent d’être soutenues d’après les membres de l’association. En effet, après avoir échangé avec les encadreurs de l’IADH, il se trouve qu’un membre du groupement consacre au moins 12 jours par mois uniquement aux activités de santé communautaire. En outre les prix des indicateurs mériteraient d’être revus à la hausse pour récompenser les efforts des agents de santé communautaire, qui visiblement sont des maillons forts au niveau périphérique du système de santé.
Par ailleurs une formation plus structurée, ciblée, touchant la thématique santé et actualisée pourrait aussi renforcer le savoir et le savoir-faire des agents de santé communautaire. A Rutana, les groupements sont déjà constitués mais visiblement ces derniers méritent un encadrement soutenu. Les GASC de Rutana rencontrés ont des initiatives louables comme celles en rapport avec l’entraide mutuelle mais nécessitent une base de départ.
Sur un autre registre, la motivation des ASC devrait être harmonisée. A Gitega notamment au centre de santé de MUBUGA, les agents de santé communautaire obtiennent à peu près 30 % du FBP quand le bonus est disponible. Selon le Titulaire du centre de santé MUBUGA, 27 agents de santé partagent en moyenne la somme de 100.000 fbu. Une manne !
En définitive, l’expérience pilote FBP mériterait d’être étendue dans certaines provinces sanitaires pour tirer des conclusions à une échelle plus ou moins fiable. Ces dernières pourront alors alimenter le montage du FBP seconde génération. Certaines initiatives notamment les activités génératrices de revenus pourraient être soutenues par des partenaires techniques et financiers à travers un cadre de coordination consensuelle. [Télécharger PDF]
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